avril 2023
ARTISANAT
ébéniste créatif
La sculpture du fer et du bois à l'âge contemporain
Richard, ancien ébéniste, met en formes son imagination fertile.
Parfois l'artisanat domine l'artiste. Richard Thorron ne se laisse pas dominer. Des mains impatientes guidées par une imagination insatiable le mènent à la réalisation de sculptures contemporaines. Entrons en immersion dans son univers atypique, mais non moins dompté
Après un métier bien trop pratiqué.
Son métier, il l'exerce depuis l'âge de 16 ans. Il a la sensation d'en avoir fait "sacrément" le tour. Après l'arrêt involontaire de son entreprise d'ébénisterie, Richard se rend compte très vite qu'il a les mains qui le démangent. Et puis, pour lui, rester à la maison sans rien n'y faire n'avait aucun sens.
Souvent au petit matin, il a à l'esprit des images, des idées créatives apparues dans son sommeil. Il s'empresse alors de dessiner, entre brioche gourmande et café, toutes ses volutes et autres formes oniriques alambiquées. Une découverte pour lui-même, car il ne se savait pas aussi à l'aise dans cette pratique de la représentation graphique. Ses crayonnés, fidèles aux songes de ses nuits, sont affichés ensuite sur les murs de son atelier, dans l'attente de se voir matérialisés par les mains du sculpteur autodidacte. L'envie de sculpter est née ! Ses inspirations l'ont amené à découvrir le fer et à le mélanger au bois. Du fait d'avoir été ébéniste pendant de longues années, cette nouvelle matière devint vite sa préférée, mais sans pour autant renier celle de son talent d'origine. L'introspection est à l'origine de toutes ses rêveries artistiques et c'est ce qui fait de lui un sculpteur débonnaire envers ses œuvres. Même après finalisation, aucun repère extérieur à lui-même n'émane de ses admirables pièces. Il prend énormément de plaisir à donner naissance à ce mélange de matières qui le lui rend bien. En effet, dans cette satisfaction personnelle, le caractère de Richard s'adoucit, devient bienveillant et surtout s'apaise. Nous avons pu le constater dans l'accueil chaleureux qu'il nous a réservé.
L'art n'est pas toujours commercialisable.
La vente de ses sculptures n'est pas sa motivation principale, mais il ne boude pas son plaisir lorsque celles-ci sont exposées au public. C'est ce qui fait la différence entre l'artisanat et l'art "tout court" selon lui. S'il faisait de son art du commerce, il reviendrait à ce qu'il a auparavant repoussé ; créer à la commande avec les contraintes que cela impose. Il préfère de très loin son indépendance créative d’aujourd’hui et ne dévoiler son âme que lors d'expositions choisies.
La dernière en date a eu lieu cet été au Château de Montrond-les-Bains. Précédemment, il avait exposé dans les locaux d'un déménageur réputé, à L'Étrat dans la Loire, parce que le cadre se prête souvent à des événements de cet ordre. Défilés de mode et autres expos d'artistes nationaux y sont légion, sauf en temps de confinement bien entendu. Parfois, nous dit-il, certaines productions pourraient se vendre, mais il préfère refuser parce qu'elles ont une contexture en étroite communication avec sa personnalité ou avec celle d'Yssingeaux, lieu de sa naissance. Nonobstant, il reste avisé quant au fait qu'il faut quand même bien gagner sa vie. Alors, il laisse quelques fois partir des œuvres, un peu triste et contraint par ce diktat. |
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"Même le tablier
en cuir de Richard
paraît sculpté"
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Organisation et rigueur riment avec efficacité.
Richard n'a rien perdu de la rigueur exigée par son précédent métier et nous le constatons rapidement dans son "garage-atelier". Tout y étant si méticuleusement organisé et strictement rangé, que nous pouvons immédiatement y définir deux zones distinctes. Une pour le bois avec tout le nécessaire pour l'excellence que requiert cette matière noble, une autre pour le fer avec, là aussi, une telle méthodologie ordonnée, que tous les parents rêveraient d’y envoyer leurs "ados" en stage afin qu'ils s'en inspirent pour le rangement de leur chambre. Certains dessins, ayant donné lieu à des réalisations aperçues dans le salon de l'artiste, trônent encore sur les murs, d'autres attendent leur tour. Dans chaque espace de travail, sous les croquis, des rampes d'outils ; ciseaux à bois, limes de toute taille, pointeurs, tournevis et autres marteleurs, sortent de l'anonymat de par leur homogénéité parallèle. On dirait un miroir d'outils même si nous avons bien compris qu'aucun d'eux n'a la même affectation.
Notre singulier artiste nous accorde une petite démonstration de la façon dont il se délecte de son art. Tout d'abord, il s'équipe d'un magnifique tablier de cuir fait maison, là encore conçu par ses mains hyperactives. À coups de maillet en bois, notre homme frappe, avec beaucoup de délicatesse et de dextérité, un morceau de bois aux volutes proches de celles des cornes d'antilope. La lumière du spot au coin de l'établi donne des reflets chauds au bois et teinte le visage du sculpteur d'une atmosphère doucereuse et agréable. Puis Richard nous présente sa forge, juchée sur une tour de bois d'environ 1,30 mètre faite maison. Décidément, nous avons à faire à un artiste complet. Le support de cette petite boite à cuire le fer est, lui aussi, le reflet d'une organisation sans faille. Rien n'est laissé au hasard. Rien ne pourrait mettre en péril la conception d'une œuvre à cause d'un outil mal rangé ou inapproprié. Richard aime l'ordre et ça se voit à l’œil nu. De quoi le jalouser un peu quand notre propre garage ressemble davantage à une friche industrielle abandonnée. La forge à gaz allumée, Richard l'incite à braiser une barre de fer d'un centimètre de diamètre. Il faudra peu de temps à la surpuissante chaufferette pour que cette dernière présente les premiers signes de sa soumission. L'artiste sort alors la barre, avec beaucoup de précaution, et s'empresse d'aller lui "taper le bout rougeoyant" sur son enclume. Devinez quoi ? L'enclume porte, elle aussi, le reflet d'un agencement ordonné. Vous n'êtes pas étonnés ? Nous non plus ! |
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Place à la présentation des œuvres.
Même si nous les avions quelque peu observées durant la première partie de notre reportage, il fallait tout de même que nous entrions en contact avec les réalisations de Richard. La première chose à noter est la cohérence déroutante entre le dessin originel et la conceptualisation produite. Nous ne pouvons que nous dire la chose suivante ; notre artiste est un génie qui s'ignore. L'art est inné chez lui, cela ne fait plus de doute. Des visages, des personnages extraordinaires, des bestioles fantasques, des objets fantaisistes, tous ou presque regardent notre monde, tantôt avec un œil éberlué, tantôt avec compassion. Dans le détail de chaque pièce, nous devinons l'étendue du travail sur la matière et nous intégrons cérébralement l'outillage assujetti aux multiples manipulations de l'artiste. Des détails qui laissent peu de place à l'improvisation et qui implicitement vous transportent dans l'univers du créateur. Richard nous a gardé le meilleur pour la fin. Il nous présente alors un robot de fer et de bois qui nous observait depuis un moment et attendait de nous, que nous lui rendions la célébrité qu'il mérite. Nous lui faisons la part belle en le prenant en photo dans un univers qui lui correspond avant de découvrir son petit secret. Le petit homme robotisé possède la particularité d'avoir, au sens mélioratif, une "tête d'allumé". En effet, Richard l'a doté d'une ampoule et c'est du plus bel effet quand le courant passe ! Après avoir photographié quelques œuvres d'art de Richard, nous quittons notre artiste avec la ferme intention de vous avoir conquis par sa vision de l'art et donner ainsi l'envie de le découvrir lors d'une future exposition. Pourquoi pas en partenariat avec un événement Altilimag ? |
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Envie de
vous sculpter
une idée?
Richard Thoron
43200 Yssingeaux
+33(0) 6 41 94 54 02
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