avril 2023
ÉCOTOURISME
curiosité tellurique
Et au milieu coule une rivière de lave
À Saint-Julien-d'Ance la géologie joue des tours à elle-même.
Quand vous entendez parler de révolution géologique votre curiosité peut être prise à partie. C'est bien ce qui nous est arrivé quand Tim, fan d'Altilimag des premières heures, nous a raconté qu'à quelques petits kilomètres d'Yssingeaux (une trentaine pour être honnête) existe un site géologique hors du commun et surtout d'une beauté à couper le souffle. Il ne nous en aura pas fallu plus pour chausser nos crampons et nous rendre sur place voir ce que ces lieux ont de si magnifique à nous dévoiler.
Un nuancier de couleurs naturelles.
Route de Craponne-sur-Arzon, notre impatience augmente alors que nous nous approchons de plus en plus près de notre but. Nos appareils photo sont chargés, les batteries de secours pleines et nos carnets de notes vierges de toute émotion. Sur la D26 qui mène à Saint-Julien-d'Ance via Saint-Georges-Lagricol, le spectacle des doux rayons solaires de l'automne nous donne déjà le ton.
Enfin arrivés au petit parking situé au pied de notre expédition, nous découvrons avec stupeur une quantité impressionnante de blocs de pierres tout à la fois grisées et verdies par le lichen et la mousse sauvage, tout au long des millénaires qui nous séparent de la naissance de ces lieux. Cet amas insolite forme une vague se faufilant dans la forêt de hêtres, de sapins et de pins. Nous commençons notre ascension par la gauche du site comme nous l'indique le panonceau touristique. Mais nous aurions pu faire ce tour de trois kilomètres en sens inverse puisqu'il s'agit d'une boucle (à bon entendeur et bon marcheur). Le chemin rendu glissant à cette saison de l'année nous promet malgré tout une belle promenade. |
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Les arbres divers et variés sont traversés par les rayons généreux de notre étoile fétiche. Leurs racines mélangées aux morceaux de roche traversent de part en part le sentier, donnant un aspect mystique au lieu.
Un premier spectacle déjà très bombardé par nos objectifs, titillant l'adrénaline qui nous pousse dans la direction du point culminant. De-ci, de-là, à gauche, à droite, des passages déboisés permettent d'approcher la coulée de rochers et de prendre peu à peu la démesure que représente un petit caillou quand il se pavane parmi quelques millions de ses amis. C'est assez rapetissant en fait !
Le chemin continue de monter assez abruptement, mais ce n'est pas pour autant une épreuve éreintante. Nous ne sommes pas de grands marathoniens et nous avons tout de même atteint aisément le sommet.
En haut, c'est là que tout prend son sens ! En effet, le visuel est saisissant. L'horizon s'étend jusqu'à la cessation de notre interprétation oculaire, la coulée de lave (en réalité des éboulis dont on vous donnera quelques indications techniques après) est bordée d'arbres tour à tour mordorés, vert citron, rougeoyants ou encore brun-jaune. Une pure splendeur saisonnière, une harmonie colorimétrique naturelle ! Marcher sur ces rochers n'est pas si simple, il faut avoir quelque peu le "pied marin".
Des blocs instables bougent à notre passage et la mousse rend le hors-piste incertain. C'est tout de même le long du sommet que nous avons décidé d'emprunter cette voie boiteuse. Pour, d'une part, gaver nos cartes mémoire de clichés magiques et de l'autre, parce que nous sommes encore des enfants, il faut bien se l'avouer ! Sur ces rochers capricieux,
nous prenons un instant pour ressentir les différents mouvements géologiques de l’éboulis. Si la pierre ne risquait pas d'être aussi douloureuse à l'impact, nous aurions pu imaginer faire du surf sur ces vagues successives afin de rejoindre le parking. Mais arrêtons de rêver et la réalité n'en sera que plus confortable. |
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D'en haut, l'horizon nous dévoile
toute sa réalité
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Vue imprenable sur le plateau de Vacherolles.
Une table d'orientation, gravée dans la roche volcanique, nous attend sous les plus hauts pins du secteur et nous délivre les quelques secrets géographiques que nos yeux ne peuvent déceler. De cet endroit, la magie opère et nous peinons à nous diriger vers la phase retour. Le temps s'est arrêté face à cette coulée majestueuse et pleine d'émotions. Aussi nous profitons longuement des effluves de la forêt, de l'ambiance tectonique du basalte, de l'horizon infini et de la douce chaleur du soleil d'automne. Sous la lumière rasante, chacune des pierres de l'éboulis prend la forme d'un Apéricube® saveur nature pour les uns ou de Légo® pour les autres, mais nous pourrions tout aussi bien imaginer un puzzle de 5 000 pièces éparpillées dans une vallée de géants invisibles. Notre imaginaire est au beau fixe, la vue inspire le respect et force nos cerveaux étriqués à s'évader. |
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C'est lorsque la bise fraîche de fin de journée nous frôle le haut de la nuque que nous décidons enfin de partir. Dès le début de ce retour forcé, nous apercevons une des plus belles cabanes en bois que nous ayons eu l'occasion de croiser en forêt. Un petit trois-pièces avec dépendance fait de branchages et de cordages au beau milieu d'arbres vantant leurs couleurs flamboyantes. Nous laissons cette architecture surprenante et bien gardée pour amorcer notre descente. Prenez garde, car de ce côté de la coulée, l'eau est plus présente et rend l'expérience acrobatique (surtout si vous êtes mal chaussés) ! À mi-chemin, une percée boisée permet d'admirer encore un peu l'éboulis volcanique et de mieux observer les courbes déterminantes qu'ont suivies les roches durant leur chute. Le parcours nous ramène à notre point de départ, la boucle est bouclée et nos esprits sont vagabonds.
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Un peu de géologie pour les puristes.
Sur les pentes du plateau de Vacherolles, entre Saint-Julien-d'Ance et Saint-André-de-Chalencon, il y avait un ensemble de quatre volcans différents les uns des autres. Témoignant d'un très riche passé volcanique en Haute-Loire. L'un d'entre eux, de type strombolien, a donné naissance entre les deux villages il y a environ 6,5 millions d'années, à plusieurs coulées de lave successives après une explosion de cendres, de projections de bombes rocheuses et de vapeur. Après un bouleversement du terrain lié au détournement naturel de l'itinéraire de l'Ance, les points culminants et les plus inférieurs se sont inversés. On appelle cela une inversion de relief géologique. Le poids de la coulée de lave reposant sur un sol argileux, conjugué à cette érosion naturelle, a créé un affaissement sous l'ensemble de colonnes basaltiques hexagonales (appelées aussi orgues basaltiques et nombreuses sur la région Auvergne) faisant ainsi chuter les blocs de lave. Les périodes de gel et de dégel successives favoriseront le glissement sur plus d'un kilomètre et donneront ainsi naissance au site monumental que nous connaissons aujourd’hui. Il ne s'agit donc pas exactement d'une véritable coulée de lave, mais d'un éboulis de roches volcaniques. Ce ne sont pas ces quelques détails techniques réservés aux plus avides de précisions qui vont dessaisir les lieux de leur majesté et éroder la force qu'ils déballent pour nous laisser à notre petitesse humaine.
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Envie de
prendre des
couleurs?
Coulée de lave de Bourianne
43201 Saint-Julien-d'Ance
45°18'09.5"N 3°55'27.6"E
45.302639, 3.924334
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